On pense très souvent à tort que les ateliers d’écriture sont nés aux États-Unis avec les creative writings. Les working work shops sont en réalité nés bien plus tard. Suivez-moi et je vais vous raconter la fabuleuse histoire des ateliers d’écriture.
On retrouve des prémices en l’an 42 après Jésus-Christ du côté de chez Quintilien, un célèbre avocat mais aussi écrivain et professeur de rhétorique, né dans l’actuelle Espagne.
Les 5 arts oratoires de Quintilien
C’est tout simplement Quintilien (Marcus Fabius Quintilianus) qui est à l’origine des méthodes d’écriture que nous utilisons encore aujourd’hui. Il a en effet défini les 5 étapes qui caractérisent l’art oratoire :
✧ Inventio : trouver des idées sur un sujet, l’invention.
✧ Dispositio : organiser son discours afin de développer son sujet de façon structurée, la disposition.
✧ Elocutio : choisir la manière de dire son discours afin de capter son auditoire, l’élocution.
✧ Actio : écrire pour faire agir, allier la parole et le geste, l’action.
✧ Memoria : mémoriser son discours, la mémoire.
Lors d’une séance d’écriture, nous suivons ce même chemin, mis à part peut-être la partie mémorisation.
Les Romains aussi avaient pour coutume de réunir des amis et de leur faire la lecture de leurs textes pour recueillir leurs avis avant de les rendre public, tout comme Ausone (Decimus Magnus Ausonius), un avocat qui a vécu de 310 à 395 après Jésus Christ dans la région de Bordeaux et qui enseignait également la grammaire et la rhétorique.
Théophile Gautier et Antoine Albalat, les premiers maîtres
Beaucoup plus tard, c’est Théophile Gautier au XIXe siècle qui affirme qu’écrire peut s’enseigner et qui deviendra un professeur d’écriture du milieu de sa vie jusqu’à sa mort : « je m’entourerai de jeunes gens et je les initierai aux secrets de la forme et aux mystères de l’art. Tout s’apprend en ce monde et l’art comme le reste. Je convertirai mon salon en atelier de littérature et je formerai des élèves ». Si au départ il se destinait à la peinture, c’est sa rencontre avec Victor Hugo qui le mènera à la littérature.
Antoine Albalat (1856–1935), critique, auteur de romans et de nouvelles et notamment rédacteur au Feuilleton littéraire, développe une théorie du style dans L’art décrire enseigné en vingt leçons. « J’ai voulu être un guide pour ceux qui ne peuvent en avoir d’autres. Voilà quinze ans que je me bats avec les mots et que j’écris du roman, des nouvelles et des articles de critique, faits et refaits avec acharnement ». Il écrit également un essai intitulé Comment il ne faut pas écrire, les ravages du style contemporain, dans lequel il prône la simplicité et le naturel. « J’ai été conduit insensiblement, à travers mes lectures, à dresser une sorte de recueil des principaux défauts de style, exagérations d’écoles, fausses doctrines, erreurs à la mode, tournures vicieuses, dérèglements d’imagination et de goût, négligences, phrases désagréables et autres locutions plus ou moins volontaires qui font partie de ce qu’on pourrait appeler le mauvais art d’écrire ». Un très bon article de https://www.lalanguefrancaise.com reprend les conseils d’Antoine Albalat. Si vous avez deux minutes, prenez le temps de les découvrir.
Gautier et Albalat font figures de novateurs car jusqu’à la fin du XIXe siècle, l’écriture est plutôt une activité solitaire et sacrée et l’écrivain est un inspiré qu’on admire mais que l’on ne tente surtout pas d’égaler.
Le XXe siècle : un nouveau regard sur le processus d’écriture
Ce n’est qu’en 1937 que le premier diplôme sanctionnant les cours de Working Work Shops naît. Et au tournant des années 60 on compte même 340 cours donnés par des écrivains dans les universités américaines (comme Joyce Carol Oates ou Jonathan Safran Foer). Des auteurs célèbres s’y sont formés, comme Stephen King (Misery, Carrie, Ça, Shining, Le fléau), Raymond Carver (Short Cuts, Les vitamines du bonheur), John Irving (Le monde selon Garp, Une prière pour Owen, L’hôtel New Hampshire) ou Dan Simmons (Hypérion, Nuit d’été, L’homme nu), et plus tard nos écrivains françaises Anna Gavalda (Je voudrais que quelqu’un m’attende quelque part, Je l’aimais, Ensemble c’est tout) et Catherine Pancol notamment (Les yeux jaunes des crocodiles, Muchachas).
Plus tard, au sortir de la première guerre mondiale, un instituteur de campagne, Célestin Freynet, propose des alternatives à l’enseignement en développant des méthodes actives comme le journal scolaire, les textes libres et les correspondances interscolaires, l’écriture étant centrée sur l’expression, à la fois support de la parole et support de la pédagogie. Il est novateur dans le sens où il pense que l’écriture libre de l’enfant doit occuper une place centrale dans son travail et doit être adressée à d’autres pour être lue, discutée et même publiée. Pour lui l’écriture est d’abord un moment d’expérimentation en groupe.
Au début des années 60, Raymond Queneau développe avec l’OuliPo (Ouvroir de Littérature Potentielle) un atelier de littérature expérimentale. Il lance des idées de travaux comportant des contraintes, ce qui a par exemple donné au lieu au célèbre roman de Georges Pérec, La disparition, dans lequel la lettre e est absente. Les surréalistes avaient aussi travaillé de nouveaux modes d’écriture en utilisant les rêves, l’inconscient et les automatismes pour libérer le contrôle de la raison. Nous utilisons toujours aujourd’hui des exercices issus de leurs créations dans les ateliers d’écriture. En effet cela peut paraître paradoxal mais la contrainte favorise l’écriture et développe l’imagination. Baudelaire disait d’ailleurs que « parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense ! » et Pérec, pour qui « les fabuleuses contraintes […] sont liberté » se donne « des règles pour être totalement libre ». Avec mai 1968 et la libéralisation des mœurs, l’écriture devient un acte militant et c’est à cette époque que les ateliers d’écriture prennent leur essor en France. La contestation du pouvoir n’est plus seulement réservée à une élite mais les classes dites populaires y ont accès.
Élisabeth Bing, une pionnière en France
En 1969, Élisabeth Bing, engagée comme enseignante de Français auprès d’enfants en difficulté, par l’Institut Médico-Pédagogique de Beauvallon, invente les ateliers d’écriture. De formation littéraire et journalistique, elle a retracé son expérience dans son livre Et je nageai jusqu’à la page, paru en 1976. Confrontée à des défis inattendus, elle crée sa propre méthode en suivant son intuition et en expérimentant. Ensuite elle est notamment la première à animer des ateliers d’écritures en maison de retraite ou dans les comités d’entreprises et à former des animateurs qui créent eux-mêmes leurs propres ateliers.
Et aujourd’hui qu’en est-il ?
Eh bien on trouve des ateliers d’écriture partout en France et des écrivains organisent même des master classes en ligne, comme Éric-Emmanuel Schmitt et Bernard Werber.
Cela vous tente ? N’hésitez pas à vous lancer et auparavant découvrez pourquoi vous ne devez pas hésiter ici !
Valérie Chèze, septembre 2020
Oui, je prends rendez-vous car je veux en savoir un peu plus
Une première rencontre en visioconférence pour faire connaissance
et évaluer vos besoins.
Le temps d’un clic et j’écris pour vous !